Sabaidee ça veux dire bonjour en Laos. Vous comprendrez plus loin pourquoi ce mot est resté imprimé dans nos mémoires.
Pour notre première nuit au Laos nous visons un petit village et une guesthouse pour s'habituer doucement à ce nouveau pays. On a quand même parcouru 110 km et du dénivelé en cette journée et on a hâte d'arriver. Pourtant quand on arrive à la seule guesthouse indiquée sur maps, la dame nous remballe sans plus d'informations et nous voilà livré·es à nous mêmes au soleil couchant. Heureusement après quelques discussions en laos français on comprend qu'il y en a une autre juste à côté, ouf ! Les guesthouses ne coûtent pas chers et on va bien les utiliser pendant notre traversée du pays, mais il ne faut pas s'attendre à un hôtel ! C'est plutôt pour les camionneurs ou des personnes qui veulent passer quelques heures dans un lit ensemble, alors souvent il n'y a pas de couverture, la salle de bain est minimaliste et la propreté laisse à désirer. Il ne faut pas avoir peur non plus des bébêtes en tout genre qui se faufilent : fourmis araignées et geckos !
On commence le vélo au Laos par une partie vraiment pas facile : 200km de campagne pour éviter 400km de route mais avant de partir on ne sait pas trop l'état de la route. Campagne ici = des minuscules villages avec rien au milieu de nul part. On met 4 jours pour faire les 200km, ça change de nos 120 bornes quotidiennes au Vietnam. La route alterne entre piste, béton défoncé et sable, ce qui est vraiment le pire pour nous. On est couvert·es de poussière toute la journée, on est secoué·es dans tous les sens on chute plusieurs fois, Merlin casse même son porte bagage. C'est assez dur physiquement mais aussi mentalement d'aller aussi doucement et de devoir pousser les vélos 10 fois par jour. Il y a quand même quelques camions sur cette route de l'extrême, mais pour l'anecdote on se fait dépasser à un moment par deux camions, puis on les retrouve quelques kilomètres plus loin, l'un des deux a crevé et change sa roue. Ils nous redoublent dans la journée puis on les redouble car le deuxième a crevé. Finalement on arrive au village étape avant eux !
On est vraiment les seul·es blancos ici et on ne passe pas du tout inaperçu·es dans les villages. Ici pour désigner les étrangers le terme est " phalang", alors à notre passage retentissent des "ohhhh phalang ! SABAIDEEEEE !" . Ça marche tant qu’on roule, par contre dès qu'on s'arrête quelque part les enfants deviennent très timides et curieux à la fois, ils se cachent à quelques mètres de nous et nous observent. Les villages sont tout en bois sur pilotis, au milieu des massifs karstiques et c'est quand même très joli avec la piste en terre rouge. Dans les champs se dressent de petites huttes en hauteur qui servent aux paysans à se reposer ou à laisser leurs enfants pendant qu'ils travaillent. C'est dans ces huttes généralement que nous posons la tente, on est en hauteur et abrités c'est parfait.
80% de la population du Laos est rurale et les villes n'ont pas immense intérêt ce sont plutôt des maisons construites au fur et à mesure au bord d'une route. Le tourisme est beaucoup moins développé que chez les voisins thaïs ou vietnamiens. La vie est plutôt simple, c'est une vie de village communautaire dans laquelle on cultive son champs et on élève ses bêtes, on vend le surplus au bord de la route et on boit des bières. On se croirait un peu tous les jours dimanche il faut l'avouer et dans cette campagne on ne voit pas beaucoup d'écoles bien remplies. Il y a quand même dans quelques villages des petits magasins qui vendent tous exactement la même chose puisqu'ils ont été ravitaillés par le même camion : nouilles, shampoing en paquet individuel, thé glacé de marque thaïlandaise et c'est à peu près tout. On s'arrête pendant ces 4 jours quand même dans un lieu qui essaie de développer le tourisme. C'est une immense grotte d'où sort une rivière dans un parc naturel. Un petit camping a été construit et on est bien sûr les seul·es mais ça nous fait bien plaisir d'arriver ici. La rivière est très belle et la visite de la grotte le lendemain avec notre guide privé en bateau est mémorable. On comprend pourquoi le lieu n'est pas encore développé : pour venir depuis la route principale il faut faire un aller retour de 160km sur une route défoncée !
Bref après cette visite reposante et rafraichissante on finit notre épisode cambrousse en arrivant à Mahaxay, une petite ville sans intérêt mais qui nous fait arriver sur une boucle de tourisme assez connue. Surtout à Mahaxay nous retrouvons Jules, un ami de Merlin qui vit au Laos depuis 7 ans. Ce dernier habite à Vientiane la capitale mais est venu dans ce village pour le mariage de son meilleur ami. Comme nous sommes là aussi, nous sommes invité·es à passer au mariage. Les mariages ici sont de 9h du matin à 18h le soir donc dès notre arrivée à 11h on nous sert déjà de gros verres de bières. La musique est très très très forte, c'est impossible de se parler mais les laotien·nes adorent monter le son et n'aiment pas spécialement parler pendant des heures alors ça leur convient. Au moins comme on ne connait personne c'est facile il n'y a qu'à faire comme tout le monde, boire, manger et trinquer !
On repart à 14h sous un soleil de plomb avec quelques verres dans l'estomac. On attaque donc "the thakek loop" une boucle touristique avec une route toute neuve et plein de spots très sympas sur le chemin. Première étape : une cascade très cool avec une grande piscine naturelle où on passe la nuit.
Deuxième étape : un petit chemin de randonnée avec une vue sur l'immense lac artificiel et une nuit dans une guesthouse réputée pour son barbecue à volonté et dans laquelle on passe une super soirée. Troisième étape : des piscines naturelles dans lesquelles le gardien nous autorise à passer la nuit, nous enferme, nous dit qu'il ouvre le matin à 7h30, mais finalement n'est toujours pas là à 8h45 alors nous sommes obligé·es d'escalader les barrières avec nos vélos. Dernière attraction : des massifs montagneux acérés et magnifiques (même si la montée à 15% se méritait à vélo!).
Puis après ces quelques jours sauvages mais où nous n'étions pas les seul·es “phalang” saugrenu·es à être là, nous retrouvons la route principale qui doit nous mener à Vientiane. Petit point sur la nourriture au Laos : beaucoup plus de viande, moins de tofu, cela ne fait pas le bonheur de Maéli. Mais le riz frit se trouve dans tous les bouis bouis et il est très bon état végétarien alors c'est notre repas quotidien ! Du riz de l'oeuf et des légumes, quoi de mieux pour pédaler sereinement ?
Bref, il nous reste donc 250km de route principale droite, plate, défoncée et remplie de camions qui soulèvent des nuages de poussière ce ne sont pas les jours les plus palpitants. Mais bon ce n'est pas parce que nous sommes en voyage que tous les jours sont exceptionnels et on s'accroche pour boucler cette route en deux jours. C'est assez fou de se dire que c'est la plus grande route et plus fréquentée du pays et qu'elle est en si mauvais état. Nous pédalons pour la premiere fois à côté du Mékong, ce fameux fleuve qui traverse la Chine, le Tibet, le Myanmar,le Laos, qui borde la Thaïlande puis le Cambodge et le Vietnam.Heureusement juste avant d'arriver nous faisons un petit détour sur une route bien meilleure avec en prime la visite d'un " bouddha parc" et ses fameuses glaces à la noix de coco.
Sales et fatigué·es nous arrivons finalement à Vientiane après 12 jours consécutifs sans pause de vélo chez Jules qui nous accueille chez lui. Cette capitale est l’endroit idéal pour se ressourcer car c’est aussi un repère d’expatrié·es européen·nes, et donc plein de boulangeries et de restaurants français qui nous rappellent la maison ! On profite aussi de Jules qui nous donne toutes les bonnes infos et qui nous parle longuement des laotien·nes et de leur culture. Ça nous donne l’impression de mieux comprendre ce qu'on voit et ce qu'on vit dans notre routine à vélo et dans le contact avec les locaux. Ce temps de pause nous sert surtout à recharger les batteries, mais on visite quand même une petite exposition sur les séquelles des bombardements américains sur le sol laotien pendant la guerre du Vietnam. Il faut savoir que le Laos est le pays qui a connu le plus de bombardements au monde avec une estimation de 270 millions de bombes lâchées ( cela représente une mission de bombardement toutes les 8 minutes pendant 9 ans ). Les chiffres sont assez impressionnants ! Le problème c’est qu'environ 30% des bombes n’ont pas explosé et ont transformé certaines régions en véritable terrains minés, dont la région que nous avons traversée au début de notre périple au Laos (oups). En effet presque 50 ans après les bombes peuvent encore exploser en étant mal manipulées. Le gouvernement a donc mis en place un centre pour les personnes estropiées à cause de bombes explosées. C'est ce centre qui présente l’exposition. Il travaille aujourd'hui à des activités de prévention auprès des locaux et de déminage. C’est aussi assez intriguant de voir comment ces restes de la guerre font maintenant partie du paysage. Il n’est pas rare de voir les matériaux des bombes réutilisés pour bricoler des objets du quotidien comme des casseroles ou des couteaux par exemple. Il y a même un endroit où des structures de missiles ont été réutilisées pour faire des kayaks. Enfin bref, une visite plutôt intéressante et marquante.
Sur une note plus sympathique, nous avons aussi eu l’occasion d’aller à un festival de nourriture sur les bords du Mékong pour goûter quelques spécialités. Il paraît que, en tant que français, nous avons en commun avec les laos la passion de la gastronomie.
Après s’être bien goinfré·es pendant 2 jours de spécialités laos et de produits français, il est temps pour nous de remercier Jules pour son hospitalité et de reprendre la route. Nous partons en direction des montagnes au nord pour rejoindre la ville de Luang Prabang, place importante de l’ancien royaume lao. Il nous faut 5 jours pour arriver à destination. Les routes n’ont pas changé, plutôt en mauvais état, mais en plus, là, ça monte !
On s’en sort qu’en même tant bien que mal, on profite d’un petit passage par des sources chaudes aménagées pour poser la tente et se relaxer (notre activité favorite en voyage à vélo), et on fait une ascension épique dans le brouillard au côté d’une colonne de camions arrêtés sur quelques kilomètres à cause d'un des leurs bloqué dans la boue en tête de file. On a même pu assister en exclu à une tentative de remorquage à la simple force des bras.
L’atmosphère de la montagne nous plaît plus que le plat précédent Vientiane malgré le brouillard qui gâche parfois un peu la vue. Une fois arrivé·es à Luang Prabang, on retrouve nos camarades cyclistes que nous avions rencontrés pour la première fois a Hanoï. C’est toujours agréable de voir d’autres cyclotouristes comme nous sur la route avec qui on peut échanger sur nos aventures et impressions. La ville de Luang Prabang est belle, mélangeant des styles architecturaux traditionnels et coloniaux, et compte de nombreux temples. On profite aussi des quelques cascades aux alentours de la ville qui offrent un vrai paysage de jungle.
Après ces deux nouveaux jours de pause, on s’apprête à rejoindre la Thaïlande à l’issue de 2 jours de bateau pour remonter le Mékong jusqu'à la frontière. Bien que les paysages soient plutôt classes et que le bateau ne soit pas si inconfortable, on s’arme de patience car c’est quand même deux journées de 9h à bord (avec une escale pour la nuit). Mais bon, nous on adore les trajets super longs et lents !
Ps : pour bien finir au Laos on a dormi notre dernier bivouac au bord du Mékong avec une belle vue sur le soleil levant
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